Le weblog de Philippe Heymann

LA PUB INTERNET SE FAIT ENCORE PLUS TRICHEUR ET INTRUSIVE.....

Le dernier numéro de Stratégies (encore ! ) est spectaculaire  sur le sujet car, dans plusieurs articles diférents et apparemment sans lien , il nous ramène à la même conclusion :

- d'abord un très bon papier sur "le paid media qui ne dit pas son nom" : en synthèse, un nombre croissant d'annonceurs (et d'hommes politiques !) s'achètent des dizaines de milliers de "followers", "like" , "fans" etc avec l'aide - pour ne pas dire la complicité - de prestataires et ... des centrales d'achat d'espace ! Sauf erreur, cela s'appelle tricher !

- quelques pages plus loin, je lis le résultat d'une enquête Ifop pour  la régie Ad you like : 90% des Français considèrent la pubicité sur Internet comme "omniprésente" , 80 % comme "intrusive" et 61% commme "stressante"...

- et voilà que nous avons aussi un supplément spécial - fort bien fait - consacré aux "Big Data", avec pour titre "l'explosion des données numériques ouvre de nouvelles perspectives aux entreprises"... C'est un sujet que j'ai déjà abordé.

Mais de tout cela, je retire que les professionnels sont en train de scier la branche surlaquelle ils sont assis. A vouloir trop en faire..

Or, l'histoire le prouve régulièrement, l'auto-régulation, ça ne fonctionne jamais...Il est vari pourtant que certains annonceurs commencent à être plus dubitatifs : le jeu internet que l'agence veut absolument me caser vaut-il vraiment la peine ? Mes Q-R codes n'ont qu'un résultat limité en termes de cible "qualifiée" etc etc, sont des propos que j'entends de plus en plus régulièrement.

Certes Internet va continuer à se développer mais, en même temps, la pub "aveugle" risque vite d'y atteindre ses limites.

LA "MARQUE FRANCE" ET UBIFRANCE/ATOUT FRANCE/AFII : UNE BELLE IDEE MAIS...PAS SIMPLE !

La commission chargée de déblayer le sujet de la "marque France" vient de rendre son rapport et une "consultation internet" vient d'être lancée. Mais le sujet, qui est très largement un sujet de communication et de marketing,  est pour le moins "complexe"...

La commision, composée plutôt de gens compétents et même brillants, fait toute une série de propositions intéressantes. Et, apparement, elle a auditionné du beau monde. Mais on sent bien aussi qu'elle n'a guère entendu les "gens de terrain" et qu'elle s'est peu penchée sur certains échecs étrangers...

Bref, proposer la création d'un label et d'un logo , largement utilisés par le maximum d'acteurs publics et privés, c'est bien.

Réflechir sur ce que pourrait être le message commun, à ce stade autour du concept du "savoir-faire", c'est bien aussi.

Rassembler dans un même GIE des opérateurs comme UbiFrance (pour les exportations), Atout France (pour le tourisme), l'AFII (pour les investisssements internationaux en France) et mieux coordonner leurs actions et leurs campagnes ou même rassembler leurs "services supports", cela peut être bien aussi. Même si cela laisse de côté la surenchère à laquelle se livrent les régions ou les villes qui veulent toutes ouvrir leur "maison" un peu partout !

Ensuite, penser que vendre des produits français en Chine et attirer les investisseurs chinois en France, c'est le même boulot et les mêmes personnes, voire voire...Ou penser que parce que UbiFrance et l'AFII sont déjà dans le même immeuble (ce qui est déjà bien), on peut les fusionner... Ca peut vite tourner à la catastrophe ! Et, dans certaines volontés de fusions ou d'économies, si l'on va trop vite ou trop loin, le mieux devient  souvent l'ennemi du bien.

Espérons que, même s'il s'agit de "com",  les décideurs choisiront l'efficacité plutôt que l'affichage"...

PPR/KERING, LVMH, PROCTER,ORANGE : LES GRANDS GROUPES JOUENT LA CARTE CORPORATE

Comme le remarquait avec justesse un récent numéro de Stratégies et comme je l'ai déjà évoqué, les grandes marques  françaises soignent de plus en plus leur marque corporate et ont compris que celle-ci sert les intérêts de leurs "sous-marques" produits ! C'est une vraie évolution, pour ne pas dire une révolution :

• PPR s'est transformée en Kering et a lancé une vaste campagne sur le nouveau nom,

• Procter & Gamble s'affiche clairement avec ses marques,

• Orange prend la tête du groupe et a remplacé France télécom et abandonné wanadoo,

• et LVMH , avec ses Journées Particulières, fédère l'ensemble de ses marques et , à cette occasion, a renouvelé complètement son site corporate. Il est vrai que l'ancien était plutôt triste et indigne d'un tel groupe... Le nouveau reste certes dans l'ultra classicisme mais il est à tout le moins au goût du jour, même s'il ne fait pas preuve d'un esprit créatif digne des marques qui le composent. Une bonne idée : il s'ouvre directement sur une vidéo, en l'occurence consacrée aux dites Journées Particulières; il reste qu'il n'y a pas grand intérêt à regarder des visiteurs défiler dans les locaux....Heureusement, une très belle innovation malheureusement un peu perdue, au bout du site, dans les LVMH News : une série d'info et d'événements chacun illustré ou par une vidéo ou par un diaporama. C'est très bien fait et très intéressant et mériterait d'être mieux "vendue".

Tout ce chambardement aura nécessairement aussi une incidence sur le monde des agences et la ligne de démarcation entre agences "généralistes" et agences "corporate"; celle-ci , depuis plusieurs années déjà, est plus qu'ambigue !

LES AGENCES DIGITALES VONT DISPARAITRE....

Très intéressante synthèse dans Culture RP de l'étude menée par Mediaschool Group auprès de 2000 étudiants européens en com et intitulée "Next Generation of Marcoms" : plus de 80% des sondés pensent que les agences qui s'occupent des campagnes digitales et des réseaux sociaux disparaitront dans dix ans.

La raison : cet outil deviendra partie intégrante des campagnes réalisées en agence de publicité.

On pourrait sans doute dire la même chose pour ce qui concerne les RP, la com interne ou le reste. L'analyse vaut en tout cas d'être médité !

FRANCE TELECOM DEVIENT ORANGE : MERCI MICHEL BON !

C'est aujoud'hui que l'AG des actionnaires de France Telecom devait entériner le passage définitif et complet de ce qui restait encore du nom de France Télécom à celui d'Orange... Un beau symbôle !

Je me suis déjà exprimé sur ce sujet. Mais il n'est pas inutile de se rappeler la montagne de reproches faites, à l'époque, à Michel Bon, alors président de France Télécom, pour  avoir racheté aux Anglais la société Orange dans des conditions financières jugées "difficiles"... C'est ainsi à lui que l'on doit le passage à une entreprise "concurrentielle", l'entrée dans l'ère du mobile et ... le nom d' Orange.

Je n'ose imaginer que le nom de Michel Bon  ait été cité aujourd'hui devant les actionnaires. Alors... merci Michel Bon !

DE DSK A CAHUZAC ET BIEN D'AUTRES...LES COMMUNICANTS DOIVENT-ILS LA "VERITE" ???

Les affaires DSK, Cahuzac et plein d'autres posent clairement le problème de la "vérité" en communication et c'est là un vrai débat pour les communicants qu'ils soient "intégrés" ou en agence.

D'un côté, le code de déontologie des agences de RP installe clairement cette notion de vérité ; une grande agence de RP US installée en France vient d'ailleurs d'en  faire son positionnement ; de l'autre des consultants comme Anne Homel (certes c'est elle qui a conseillé DSK et Cahuzac) considérait dans une récente interview que c'est un faux sujet, sous-entendant ainsi que...

De fait, il s'agit de savoir s'il faut considérer ou non les communicants un peu comme les Avocats : être là d'abord pour protéger et défendre même si leur client est "coupable". Pas simple ! Et pas évident d'éviter l'hypocrisie !

Si l'on considère que cela se pose surtout dans le cadre d'une communication de crise, la tendance est de considérer que :

- on n'est pas obligé de tout dire à la presse,

- mais qu'il ne faut en tout cas jamais dire quelquechose qui s'avérerait faux ensuite....

Cela parait logique ; mais cette attitude est plutôt du registre de la crédibilité  opérationnelle à garder vis à vis des media que du registre de ce débat de fond. Car, au-delà, quid de la com. ( qu'il s'agisse de pub, de RP, d'événement ou autre) sur le tabac, les alcools, les soit-disant qualités de certains produits,  de la façon d'"emballer" des résultats financiers décevants et de parler aux analystes etc etc.  Et les agences  sont-elles dès lors prêtes à renoncer à certains clients ou à certaines causes "délicates"?

Clairement on rejoint le sujet de la Responsabilité Sociale...Mais je constate  que ce débat, quel qu'en soient les termes et l'issue,  est soigneusement évité et qu'on entend bien peu de gens s'exprimer sur le sujet !

LES "ACTIONS DE GROUPE" VONT BOOSTER LA COM. CORPORATE !

Les fameuses "class actions" ou "actions de groupe" vont bientôt exister vraiment en France..., après bien d'autres pays. Et le projet préparé par le Gouvernement semble devoir éviter certains des excès et dérives du système américain qui aboutit notamment à ... enrichir les avocats...

Dans notre cas, ce sont les organisations de consommateurs qui devraient rassembler les "pleignants" et cela ne sera pas applicable à la santé et à l'environnement. Les premiers "visés" seront donc sans doute l'alimentaire et, plus encore, les services : le téléphone, les banques, le crédit, etc.

Cela signifie, pour tout cela au moins, que les entreprises concernées devront encore plus veiller à la qualité de leur relation et de leur dialogue avec l'ensemble de leurs parties prenantes . Et le consommateur ne pourra plus être seulement considéré comme une "cible marketing" mais aussi comme un citoyen "responsable". Une fois de plus, la communication corporate est aux premières loges et la séparation entre "com produits" et "com corporate" bien difficile à établir.

C'est d'aileurs le moment que l'AACC a choisi pour mettre plus en avant le concept de "Responsabilité Sociale de l'Entreprise", la fameuse RSE....C'est bien mais à condition que cette belle RSE ne reste plus seulement un concept de communication mais qu'elle s'intègre totalement à l'ensemble des comportements de chaque entreprise.

Si non...., gare aux "actions de groupe" !

LE "BRAND CONTENT" N'EST PLUS LA PANACEE....

On nous a tellement  rebattu les oreilles avec le "brand content" que l'étude Limelignt/Opinion Way avec Stratégies sur le sujet remet heureusement les choses à leur place.

Sur la base de 495 professionnels interrogés entre novembre 2012 et janvier 2013, je retiens surtout les points suivants :

- certes, 67% ont ou vont réaliser une opération de brand content pour leur marque ou leur entreprise. Mais, il est vrai,  certains mettent aussi sous ce vocable des opérations ou actions qu'ils menaient déjà avant la tarte à la crème du concept !

- pour 25% seulement, le brand content occupe une place "tout à fait importante" ou "asssez importante" dans leur stratégie de communication,

- pour 86%, il s'agit d'abord de travailler la culture de marque. Donc, il faut quand-même avoir d'abord une vraie "marque"...

- surprise pourtant : c'est l'agence de publicité/corporate qui apparait la plus légitime pour intervenir sur le sujet (34%) devant l'agence de communication éditoriale (23%) et l'agence digitale (20%). L'agence de customer marketing ( de fait l'agence de pub traditionnelle) n'obtient que...7% de légitimité sur le sujet !

Bref, le "brand content" a, comme par le passé, un vrai rôle à jouer mais....

PPR DEVIENT KERING : J'AIME PAS !!!

Je comprends bien que PPR veuille  changer de nom alors qu'il  est sorti du P de Printemps et qu'il cherche à sortir du R de Redoute. Et il  souhaite se repositionner sur le luxe. Il reste que le nouveau nom de Kering ne m'inspire guère même si j'en comprends la logique "rationnelle" :

- d'abord, c'est peu mémorisable même à coup de campagnes de pub ; au moment où Altadis (ex Seita) revient à son ancien nom, c'est à suivre de près même si les marques, elles, ont de superbes noms ! A moins que, au fond, ... on veuille se faire oublier en tant que groupe !

- le K, même s'il se veut breton, est lourd et rugueux ... pour du luxe et du vêtement,

- l'analogie éventuelle à "care" qui est évoquée me fait plus penser à l'aide à domicile ou à des maisons de retraite qu'à des produits "joyeux",

- et puis, aussi, le nom s'écarte totalement du luxe "français"; il est vrai que, lorsque l'on regarde la liste des marques que cela recouvre, bien peu sont françaises (Arnault les avais toutes raflées avant PPR... ? ). Cela se veut totalement international et quasi "anonyme".. . C'est un choix !

J'espère pour eux que je me trompe complètement !

A noter aussi la haute estime du groupe pour ses actionnaires : la campagne de pub promeut le nouveau nom alors que le changement n'a pas encore été approuvé par l'assemblée générale...

LE DIGITAL FAIT SAUTER LES BARRIÈRES INTERNES AUX ORGANISATIONS

Intéressante Tribune de Jérôme Goaer, directeur du département Communication financière de Publicis Consultants, dans le Stratégies daté du 28/03 sous le titre "PR offline/online : le mariage pour tous";

J'en retiens surtout la nécessité de créer les "passerelles suffisantes entre les fonctions régaliennes de l'entreprise : la communication externe, les relations presse, le marketing, la communication financière, la communication interne...".

Car, en effet, tous se tournent désormais vers  le digital et les réseaux sociaux  ; ceux-ci concernent tout autant les investisseurs ou actionnaires, les clients, les jeunes à embaucher, les parties prenantes diverses, les salariés; or Faceboook, Twitter ou les autres ne peuvent guère se découper en morceaux; et tous peuvent avoir besoin de la vidéo tournée par tel autre service de l'entreprise...

Comme dit l'auteur de la tribune, " cette interaction au sein même de l'organisation des entreprises est et deviendra demain plus que jamais cruciale."

Du pain sur la planche !