Le weblog de Philippe Heymann

JOHN GALLIANO ET DIOR : ETHIQUE, COM. OU ... MANAGEMENT ?

Rien ne peut excuser les propos et les comportements de John Galliano, même si le stress croissant et les ingrédients divers absorbés l'ont mis dans un état "hors du commun".

Il reste que la rapidité avec laquelle le groupe Dior (c'est à dire Arnault et LVMH) l'a suspendu puis licencié est pour le moins inhabituelle...

Certes, l'affaire récente Guerlain et ses retombées incitaient à agir vite ! Mais pour ceux qui connaissent la "réactivité" toute relative des cellules de crise des grands groupes et des grandes institutions, on est là devant une réactivité exceptionnelle ! Et je ne suis pas convaincu que la seule "éthique" ou les seules craintes des retombées d'image aient été des moteurs suffisants pour expliquer cette réactivité sans pareille...

Mon interprétation : comme beaucoup de stars arrivées au pinacle, John Galliano vivait dans un stress croissant : il lui  fallait aller toujours plus loin, toujours plus haut ! Au point que , peu à peu, on en devient inmaitrisable, in-"manageable"... Dès lors, le danger est au coin du bois : au premier écart grave - même s'il est inexcusable et impardonnable- on saute sur l'occasion pour mettre fin à une collaboration devenue gênante et ingérable.

Bref,  une affaire d'éthique certes, une affaire de com. certainement, une affaire de management et de business, sans nul doute !

LES RESEAUX SOCIAUX, TARTE A LA CREME ET ENJEU MAJEUR !

On ne peut plus lire un cahier des charges d'appel d'offres de com ou une reco d'agence sans y lire une solide référence aux réseaux sociaux... Et, à vrai dire, lorsque je siège dans des jurys d'appels d'offres, toutes les propositions se ressemblent....Une vraie tarte à la crème !

Et pourtant ...L'étude annuelle internationale  "The rising CCO III" , réalisée par le cabinet de chasseur de têtes Spencer Stuart et l'agence de RP Weber Shandwick , est claire : la menace que représentent les medias sociaux est la préoccupation majeure des professionnels de la communication des grandes entreprises. Et le tiers des Directeurs de la communication ne se sentent pas préparés aux dangers que peuvent représenter ces media sociaux... Un aveu suffisamment rare pour être pris au sérieux.

Mais, à ce stade, je ne rencontre pas pour autant beaucoup de prestataires, agences digitales ou autres qui proposent autre chose que du basique, la même chose à tout le monde et peu en phase avec la réalité vécue par chaque entreprise. Bref qui comprennent vraiment que chaque entreprise, chaque institution est différente. Comme si on proposait la même stratégie et quasi la même création à chaque annonceur !  D'accord, on en est encore au début ...Même aux débuts du Corporate, on faisait un peu mieux ! En plus, ici,  il y a urgence !

POWERPOINT EST-IL ANTI - COMMUNICANT... ?

Le Monde Magazine de samedi dernier consacre une interview à un certain Franck Frommer (que je ne connais pas) qui vient de publier un livre à La Découverte sous le titre : " La Pensée Power-Point. Enquête sur ce logiciel qui rend stupide"...

Je suis, comme beaucoup d'autres dans notre métier, un gros utilisateur de Power-Point et toutes les agences l'utilisent abondamment pour leurs présentations d'agences ou d'appels d'offres. Et, en com. interne notamment , c'est un outil incontournable...

Mais les propos de Frank Frommer méritent que l'on s'y arrête même s'ils sont parfois excessifs....J'en reproduis quelques extraits : "le formatage par le bas de la pensée..." ; "les listes de points forts ... étouffent la discussion, la prise de décision raisonnée" ; " ces slides projetées en gros qui s'imposent d'elles-mêmes, interdisant toute discussion sur la véracité des informations qu'elles présentent" etc

Il y a manifestement une part de vérité de ce que dit Frank Frommer : les "bullet points" mettent tout sur le même niveau et "empêchent les liens de causalités" ; et, quand quelqu'un démarre un ppt, il est rare qu'on l'interrompe ; résultat : "ces présentations anéantissent les capacités de réaction du public".

Si c'est ce que l'on recherche, alors pas de problème ! Si non ....

Loin de moi l'idée de ne plus se servir de ce remarquable outil ; mais.... à  nous de réfléchir sur la façon de s'en servir pour qu' une "présentation" ne devienne pas un monologue empêchant tout dialogue. Du boulot en perspective !

RENAULT VA FAIRE DU "SOCIETY WASHING" ...

Je lis que Renault a décidé de rattacher la com. institutionnelle à la Direction du Marketing... Certes, les temps sont durs et il faut tout faire pour vendre et récupérer des parts de marché... Mais... mais...  je crains que ce soit  la négation même de la communication institutionnelle !

De deux choses l'une :

- ou bien, le discours institutionnel - avec tout ce qu'il inclut de responsabilité sociétale au sens large et ce n'est pas rien quand on on a l'histoire et la culture Régie - s'effacera derrière le discours de vente,

- ou bien le sociétal, le développement durable etc etc vont servir à "habiller" l'argumentaire commercial, comme on le voit de plus en plus (cf. le "green washing" & co mais aussi, le "society washing" etc).

Je serais déjà moins inquiet si le rapprochement était en sens inverse : le rattachement du marketing à la com. institutionnelle ! Mais ... je rêve.

En tout cas, j'espère me tromper !

TROP DE COM PUBLIQUE POUR LAURENT WAUQUIEZ !

Le très précieux blog spécialisé communication publique relève à juste titre l'article de 20 Minutes qui reprend les propos de Laurent Wauquiez sur les communicants publics. Il déclare que les Ministères communiquent trop ! Et , à titre d'exemple, il indique que l'Education nationale compte quelque 600 équivalents plein temps en communication...
Je suis un peu stupéfait par une telle démagogie qui recouvre une analyse bien inquiétante . Quatre remarques seulement car on pourrait en écrire des tonnes sur le sujet :

1- le Président de la Républque fonde une bonne partie de sa stratégie sur la "communication permanente". La seule façon que cela ne reste pas "de belles paroles", c'est qu'ensuite les Ministères et autres institutions publiques communiquent fortement sur les mesures, réformes etc

2- toute réforme, aujourd'hui, - qui plus est de société - suppose que l'on prépare l'opinion et l'accompagne dans le changement. Et plus on veut multiplier les réformes "de structure" , plus il faudra communiquer sur elles.

3- l'Etat est encore balbutiant dans sa communication interne, ce que les entreprises appellent "la communication de changement" ; les seules premières actions engagées ( modernisation de l'Etat, fonction publique, fusion à Bercy etc etc) supposent une communication solide et difficile vers ... les fonctionnaires eux-mêmes et les usagers. Rappelons-nous l'échec de la précédente tentative de réorganisation du MINEFI car, notamment, on avait claironné et "décidé" avant d'avoir convaincu !

4- l'exemple de l'Education nationale est bien mal choisi; car 600 personnes qui communiquent chez le mammouth, quand il faut communiquer à la fois vers les enseignants, les élèves, les prof, les entreprises, l'environnement institutionnel etc, c'est... rien ! Si on considère qu'il devrait déjà y en avoir 3 ou 4 par Rectorats + un tiers temps minimum par établissement scolaire + 2 personnes mini par Faculté etc etc, les 600 sont vite dépassés. Or le besoin est criant !

Pour un porte-parole... Sans commentaire supplémentaire !

LES COÛTS DE LA COMMUNICATION

Discussion ces jours derniers avec des Directeurs de la communication du secteur de la Prévoyance réunis par le CTIP (Centre Technique des Institutions de Prévoyance) sur la structure des budgets de com et l'évolution des coûts.

Quelques tendances "lourdes" :

- les budgets ont à prendre de plus en plus en compte des prestations"immatérielles" car, comme j'en ai souvent parlé, une bonne com doit de plus en plus remonter vers l'amont ( positionnement, discours, signes etc) et s'assurer de la plus grande cohérence : cohérence dans le temps, entre les outils et moyens, entre l'externe et l'interne etc. De même, on demande de plus en plus aux prestataires d'aider à "vendre" les projets aux décideurs et dirigeants. Tout cela a un coût important car représente beaucoup de matière grise et de temps passé.

- la publicité est de moins en moins le seul "media" : toute campagne s'accompagne aujourd'hui d'une panoplie de moyens papier, web, video , internes etc

- le développement rapide des actions web pose des problèmes de coût nouveaux car les interlocuteurs dans les Directions de com n'ont pas toujours une compétence assez fine pour analyser en détail les budgets présentés par les prestataires. Et certains en profitent un peu !

- dans les entreprises, les Directions Achats jouent un rôle croissant dans les "achats de com". Cela fonctionne quand elles intégrent dee vrais spécialistes com ; ça se complique quand elles appliquent leurs méthodes habituelles à la com !

Un sujet surlequel il faudra revenir !

DE L'IMPORTANCE DES SIGNES... (suite)

A la suite de mon post du 12 février dernier sur "l'importance des signes en communication", j'ai eu recemment une discussion passionnante avec Olivier Saguez, patron de Saguez & partners, l'agence de "design" qui a notamment conçu le Lafayette Gourmet.

Difficile de qualifier aujourd'hui ce métier qui englobe l'Identité Visuelle (et donc les logos et tout ce qui va avec), le design produit, l'architecture commerciale etc et de plus en plus d'autres choses, notamment en amont ( les valeurs, le "sens" etc.).

L'homme est attachant. Surtout, je partage très largement ses refléxions sur "la vision globale de la marque" et les signes. Mais je sens mieux cela chez lui que chez beaucoup de publicitaires qui nous tiennent de grands discours supposés novateurs sur la "préeminence de la marque ", la "marque devenue media" etc. A une époque où il faut "mettre en scène les signes", la pub n'est plus à elle seule un signe suffisant . Ces fameux signent se logent partout en externe et en interne : jusque dans la qualité des toilettes et des rouleaux de papier de telle station-essence ! Et cela explique la montée rapide de "l'événementiel produit". Notre nouveau président l'a très bien compris... une fois passée son escapade en mer !

De jolies refléxions à pousser plus avant.

COCA COLA ET MICROSOFT AU TOP DES MARQUES

Le cabinet spécialisé Brand Finance vient de publier sa dernière estimation financière mondiale des marques. Pas de changement en tête : comme dans d'autres classements de ce type, Coca Cola et Microsoft devancent tout le monde ! C'est quand- même très intéressant de constater qu'une marque comme Microsoft qui n'est ni grande conso, ni luxe, ni distribution occupe une telle place ! C'est même impressionnant !

Parmi les françaises, L'Oréal tient la tête sans surprise mais seulement 14 ème mondiale, puis Louis Vuitton ( 22ème). mais, intéressant aussi, la 3ème marque française est AXA (40ème) et la suivante BNP Paribas (49ème). Classement au fond justifié mais on ne s'attendait pas forcément à les trouver dans les 50 premières marques mondiales. Un grand bravo !

Plus intéressant encore est la contribution d'une marque à la valeur totale de l'entreprise : 18% en moyenne ; mais cela atteint 84% chez Nike et 77% chez Prada. Si je ne retiens que le 18%, cela pourrait vouloir dire que l'investissement en communication pourrait légitimement revendiquer ... 18% du chiffre d'affaires (sans parler de nettement plus pour les marques de luxe)... On est loin des chiffres frequemment utilisés du genre 5 ou maxi 10 % du chiffre d'affaires !

Il y a encore du chemin à faire dans beaucoup d'entreprises !

UNE NOUVELLE ENQUÊTE SUR LES RELATIONS AGENCES - ANNONCEURS

Le Club des Annonceurs vient de faire effectuer par Limelight une nouvelle enquête sur les Relations Agences- Annoceurs. Sujet... pas très nouveau a priori ! Dans ce cas, l'intéressant est que ce sont les agences qui ont été interrogées. Et le Club a comparé ces réponses avec celles obtenues auprès des Annonceurs dans des enquêtes antérieures.

Le plus frappant (mais pas forcément inattendu !) : l'écart maximum se trouve sur "la capacité des agences à intégrer la stratégie de l'entreprise".

Cela correspond bien aux propos que j'ai rapportés dans mon blog du 21 décembre "grande conso versus corporate" sur la principale différence entre les agences "de publicité" qui connaissent le produit par coeur et les "agences corporate" qui s'intègrent complétement dans la stratégie.

Je participe actuellement à un certain nombre de jurys de choix d'agences et je peux confirmer cette très nette différence entre ceux qui répondent en collant au produit ou aux moyens et outils demandés et ceux qui essayent déjà de "trier" et de se demander quelles réponses sont cohérentes avec la stratégie ou la culture de l'entreprise ou de l'institution..

A suivre...

A LA RATP, ON NE SÉPARE PLUS COM EXTERNE ET COM INTERNE

J'entendais récemment le Dircom de la RATP expliquer que, chez lui, il ne sépare plus com externe et com interne mais qu'il a organisé sa Direction par stratégies et politiques de communication. On sait bien, en effet, que le lien entre les deux doit être très étroit en approche, en contenus, en calendrier et que, par exemple, on passe souvent par la com externe pour rebondir sur l'interne. Mais son propos va nettement plus loin...

Car c'est aussi, dès lors, la fin de la structuration par les outils et moyens ( l'édition, le web, les événements etc). Certes, il faudrait aller y voir de plus près. Mais cela rejoint bien ma note du 19 janvier intitulée "les contenus au centre de tout" et celle du 17 janvier sur "les nouveaux organigrammes de com". Et ,effectivement, les travaux d'organisation de la com que j'ai eu l'occasion de mener depuis quelques mois dans de grandes organisations vont bien dans ce sens.

Voilà, en tout cas, une vraie piste assez nouvelle à creuser.