Le weblog de Philippe Heymann

UNILEVER ET LA BATAILLE DECAUX- CLEAR CHANNEL

Unilever vient de signer un accord mondial (qui prolonge leur accord seulement "européen) avec l'afficheur Decaux : toutes les marques d'Unilever auront, sans exclusivité, un accès "privilégié" aux systèmes Decaux dans le monde entier. L'info est passionnante à plusieurs points de vue :

> c'est, à ma connaissance, l'un des premiers cas importants où un annonceur mondial signe avec un media multi-local mondial ! Il est vrai - et c'est cela qui est intéressant - que je ne vois guère d'autre cas de media qui se décline ainsi dans le monde entier, en dehors évidemment des grandes chaînes TV type CNN ou des éditions diverses et internationales de type Time, Newsweek, Financial Times, Herald Tribune etc qui jouent un rôle identique sur un public très ciblé !

> on comprend mieux, dès lors, la bataille a priori féroce que se livrent les deux géants du secteur, Clear Channel et Decaux. J'étais ces jours derniers encore à Londres où l'impression est frappante : dès la sortie de Waterloo Station par l'Eurostar, on tombe sur de grands affichages Decaux que l'on ne peut manquer. Et puis, en continuant le trajet, tout cela se mélange avec du Clear Channel ! Entre eux, la bataille se joue ville par ville, si ce n'est rue par rue !

> ce qui se passe actuellement en France entre eux deux est du même acabit ! A Paris, ce sont les vélos actuellement, gagnés par Decaux mais avec des procès en cours ! Et il y a eu l'affichage officiel de la Présidentielle pour Clear Channel ! Et cela continue ville après ville... J'en arrive à me demander si la stratégie des contestations et combats juridiques n'est pas plutôt une stratégie de communication identique chez chacun des deux leaders; car, après tout, montrer que l'on est dans une bataile ardente et sauvage a aussi des avantages pour chacun des deux : on renforce l'idée qu'il n'y a vraiment que deux grands dans ce métier ; et le combat est tel que tout le monde est nécessairement convaincu qu'ils se battent sur tous les fronts y compris les prix, redevances et autres dimensions financières qui pourraient encore éxister dans ce type de marchés "municipaux" ! De l'usage des procès en communication !

L'AVENIR DE LA PRESSE QUOTIDIENNE !

Discussion, chez mes amis Armand Braun et les "Conseillers de Synthèse", avec Henri Pigeat (ancien patron de Radio France puis de l'AFP et toujours très impliqué dans la presse) sur l'avenir de la presse écrite quotidienne.

Son analyse : il y a bien une crise mais ... des solutions peuvent éxister ! Les principales (et complémentaires) selon lui :

> passer d'une philosophie de l'offre à une philosophie de la demande, c'est à dire des attentes et besoins des lecteurs. Cela parait évident et pourtant la mutation n'est que récente, à commencer par les journalistes (je l'ai été 15 ans !) qui considéraient que eux seuls savaient mieux que quiconque ce que voulait leur lecteur !

> se diversifier . Exemples : Le Monde est maintenant un groupe avec des régionaux, des magazines "senior", des DVD et etc ; le Figaro gagne plus d'argent avec le Fig Mag et le Figaro Madame qu'avec le quotidien etc.

> intégrer écrit et web alors que , jusqu'à il y a peu, on mettait le site " à l'autre bout du jardin" !

Son analyse "historique" m'amène aussi à nuancer certains de mes propos antérieurs (voir ma note du 20 Décembre) sur les difficultés de la presse en France comparée à d'autres pays (au moins la presse quot. car les magazines et toute la presse spécialisée vont plutôt bien). Car, c'est vrai, à la fin de la guerre (il y a 60 ans), il n'y avait plus de presse et le gouvernement de la libération a tout rebâti de zéro. On est donc le seul pays où, simultanément :
- on a délivré des autorisations à des gens (certes d'immense qualité) qui avaient de beaux titres de Résistance ou de presse mais ... aucun capital à y mettre !

- on a installé les privilèges du Livre CGT dans les imprimeries !

- on a monté un système complexe de "coopératives" pour la distribution (les NMPP) que ses dirigeants actuels cherchent non sans mal à sortir de l'archaïsme...

Bref, tout a été "coincé" de tous les côtés ! Et c'est même un miracle que tout cela ait tenu si longtemps !

PUBLICIS CONSULTANTS S'ANNONCE !

Publicis Consultants publie une pub pour remercier ses clients des nombreux prix reçus cette année. Bonne initiative. C'est une excellente agence et j'y compte beaucoup d'amis que j'estime.

Cette pub passe plutôt bien en magazine (dans Stratégies par exemple) ; mais..., dans les quotidiens , compte-tenu de la mauvaise qualité de reproduction (que les agences connaissent bien), elle devient terriblement fade ! Certes, elle a le mérite de garder une certaine modestie et de ne pas tomber, comme d'autres, dans la fanfaronnade. Si j'étais annonceur, elle ne me donnerait pourtant pas grande envie de confier ma campagne corporate à Publicis Consultants... Mais, après tout, je l'ai vue et remarquée et, en premmier lieu, dans les quotidiens !

LA VERITE DES CHIFFRES AGENCES !

Il est devenu difficile de connaître la taille et la santé réelle d'une agence de com. : les filiales de groupes cotés, pour des raisons compréhensibles de cohérence boursière des chiffres, ne publient plus de chiffres par pays. On en est donc, pour tout le monde, aux "déclarations" de chacun (ou aux chiffres théoriquement transmis chaque année au Greffe), reprises par l'excellent classement des 400 de Stratégies.

Et voilà qu'EuroRSCG C&O lève "un petit coin du voile" sur sa rentabilité ! Les Echos de Mercredi 12 publient un très bon article sur la "bataille" Publicis/Havas. On y apprend (et ce n'est sûrement pas le journaliste qui a inventé ces chiffres !) que le nouveau budget EDF ( un des plus gros du marché) gagné par l'agence représente 60 millions d'euros ( de quoi ? Au total ou en achat d'espace ou ...?) et assure une "marge nette" à l'agence de 200 000 euros...

Soyons un peu sérieux ! Calculons un instant :

> sur un budget de 60 millions, même s'il s'agit du seul chiffre d'achat d'espace, l'agence réalise au moins pour 5 millions de marge brute en Honoraires, création, prestations diverses, commissions techniques etc, hors même la rémunération de la centrale d'achat d'espace; et je suis sans doute bien en-dessous de la réalité,

> les groupes ont un objectif minimum de 15% de résultat avant impôt, donc quelque 10% de "marge nette" après impôt et Vincent Bolloré n'en attend certainement pas moins...
Sur 5 millions de MB, cela fait au moins déjà 500 000 e , soit 2,5 fois les 200 000 annoncés. Et , là encore, je suis sûrement très en-dessous. Et un tel montant me paraît parfaitement normal pour l'avenir d'une entreprise.

Ce qui me choque plus : ce n'est pas en communiquant ainsi et en prenant les gens pour des imbéciles que l'on fera évoluer en mieux la relation annonceur-agence et que l'on fera la nécessaire pédagogie du métier. Cela ne me paraît pas digne d'un grand communicant.

Espérons que l'agence ne "travaille" pas de la même façon les chiffres de ses clients quand elle introduit une société en Bourse ou annonce le nombre d'actionnaires obtenus ! Dans ce cas, il est vrai, l'AMF veille au grain !

LES GRANDS PRIX STRATÉGIES

Remise hier soir, à l’espace Pierre Cardin, des Grands Prix des Stratégies de Communication 2006. Un rendez vous en principe incontournable de la profession ou, à tout le moins, des patrons d’agences primées…Car les « annonceurs » ne viennent guère que s’ils sont primés ou, éventuellement, membres d’un jury !

Les résultats, vous les lirez dans Stratégies… Quelques remarques quand – même :

➢ les primés sont excellents mais, quand on sait dans quelles conditions de sprint travaillent les jurys, ce n’est pas cela le plus intéressant. En revanche, le défilé complet donne une vision passionnante des évolutions de l’année !

➢ plus que jamais, même si ce n’ est pas nouveau, le niveau de créativité et de création du corporate a vraiment rejoint celui de la pub produit. C’est particulièrement spectaculaire sur les RP, l’événementiel, les sites internet (celui du TGV par exemple),

➢ la ligne de démarcation entre corporate et produit est parfois ténue. Cela pose un vrai problème de positionnement pour ces Prix… D’ailleurs, on voit bien comment une agence « corporate » comme EuroRSCG C&0 capte de plus en plus des budgets certes « globaux » mais à très forte connotation pubet service/produit.

➢ Les relations presse passent de plus en plus par de l’événementiel : si on veut passer au JT, il faut avoir des images et, si on a Zidane, c’est encore plus sûr !

➢ Dans cette cérémonie, l’édition écrite est apparue un peu à la terne : peu primée, peu visible alors qu’elle représente une activité très importante. Peut-être n’a-t- elle pas encore fait son nouveau bond en avant créatif ? C’est, il est vrai, un domaine où les entreprises elles-mêmes restent souvent assez conservatrices.

➢ Idem pour la com interne, mal mise en valeur, à part la très belle opération SNCF d’accueil de 4000 nouveaux embauchés. Un domaine, pourtant, où il reste partout un sacré boulot à faire…

A l’année prochaine…..

BUSINESS AGENCES

Je rencontre en permanence pas mal de patrons d'agences et de professionnels cherchant un job . La première question est toujours la même : comment va le business ?
Mon impression est que, dans le secteur com corporate et publique, cela va pour l'instant plutôt bien à la fois du côté des agences généralistes ou "globales" et des agences plus spécialisées ( édition et presse d'entreprise, événements, web etc).
Tous se demandent si, du fait des élections, nous allons connaître les ralentissements et blocages habituels, notamment du côté du secteur public.
Mon point de vue :
- oui, il y aura nécessairement certains ralentissements; j'ai clairement en tête tel ou tel annonceur public qui reportera à juillet ou septembre toute nouvelle campagne pour ... y voir plus clair du côté de ses tutelles !
- les entreprises privées et publiques éviteront logiquement de grosses campagnes ou introductions pendant la "période chaude" afin d'éviter tout risque de polémique et pour ne pas dépenser de l'argent à un moment où les esprits sont ailleurs...
- la loi électorale empêche toute institution publique liée à un élu candidat de se servir de l'argent public pour "vanter" son bilan et c'est bien normal; le SIG sera particulièrement vigileant. Mais cela n'empêche aucunement les pouvoirs publics de communiquer sur les services et les mesures : sécurité routière, déclarations en ligne, etc
- la typologie des annonceurs "publics" a beaucoup évolué avec la multiplication des agences et instituts de tous types : rien n'empêche l'INPES sur la santé ou l'INPI sur les marques ou l'ANVAR etc de communiquer.
Au total , il y aura effectivement un ralentissement sur la com externe et en particulier la pub et les relations presse pour des raisons d'efficacité et "d'esprits ailleurs" mais cela ne devrait pas empêcher de continuer les travaux de fond ; souhaitons que la rentrée de septembre soit d'autant plus active pour rattrapper le temps perdu !