Le weblog de Philippe Heymann

LAURENCE PARISOT M'A CHOQUÉ !

Je suis un partisan convaincu de l'entreprise ; j'ai beaucoup oeuvré dans ce sens quand j'étais journaliste; et j'ai ensuite créé et développé ma propre entreprise. Et pourtant, l'écoutant ce matin sur France Inter, Laurence Parisot m'a choqué !

D'emblée interrogée sur les "parachutes en or", elle s'est lancée dans un discours fabriqué, sans nuance et bien connu sur la performance, sur la nécesssité de créer des richesses etc etc. Elle s'est même mis à comparer les patrons aux joueurs de foot grassement payés , oubliant au passage que ces derniers sortent du jeu à 35 ans maxi et que nombre de PDG touchent des "parachutes" même lorsque leurs fameuses performances sont parfois difficiles à cerner ! Et dire que les PDG ont des responsabilités énormes, c'est vrai ; mais je connais bien plus de patrons petits et moyens qui ont des vraies insomnies pour leurs échéances de fins de mois , pour ne pas parler de tous ceux qui ont la toute aussi énorme responsabilité de faire manger leurs enfants à la fin du mois.

Certes, les patrons, si on veut les garder, doivent être bien et même très bien payés ! Et prêtons à l'opinion l'intelligence de savoir que ce n'est pas en les payant moins que l'on pourra mieux payer les autres. Mais le "sans nuance" de Laurence Parisot " (j'avais déjà été gêné par les papiers récents du MEDEF sur le sujet) semble oublier que les réactions tiennent à une notion non chiffrable d'"éthique", de sens profond des inégalités. D'autant que le public sait bien quelquepart que, au-delà des chiffres, les "avantages annexes" sont innombrables (retraites, chauffeur etc etc ). Et que parler du "risque" encourru par le PDG (en dehors de ses responsabilités légales normales), objectivement, je ne vois pas : quand il intègre un nouveau job mieux payé et avec parachute... où est son risque de " séparation" et en quoi diffère-t-il de ses autres collaborateurs ?

Je sais bien que le problème est complexe à résoudre. Mais les propos tenus ne vont pas dans le sens de la réconciliation des Français avec l'entreprise. Et là, c'est vraiment de la communication ! Le comble, c'est que Laurence Parisot est mieux placé que quiconque pour connaître l'opinion et qu'elle dispose des soit-disant meilleurs conseillers en communication de Paris qui, c'est vrai, ont tous les grands patrons pour clients !

LES ACTIONS COLLECTIVES PASSENT A LA TRAPPE !

Comme on pouvait le présentir, le Parlement a considéré qu'il ne disposerait pas d'un temps suffisant pour discuter, cette session ci ,de la nouvelle loi "consommation", et donc des fameuses "class actions".

Je me suis déjà exprimé sur le sujet dans ma note du 12 janvier. Je n'y reviens donc pas.

Le paradoxe est que, à l'intérieur même du groupe UMP à l'Assemblée, les points de vue divergent totalement entre ceux qui considèrent que le projet était trop timide (c'est mon point de vue) et ceux que le projet inquiétait...
Il n'est pas faux de penser que ce sujet est un élément déterminant dans le fonctionnement de notre système dit "libéral" ; je ne suis donc pas choqué que l'on veuille avoir le temps d'en discuter sérieusement, si telle est bien la motivation du "report" !
Pourtant, je me raliais presque à l'idée que, face à ce qui serait en germe une vraie réforme de société, il fallait bien commencer par un bout, quitte à élargir plus tard.

Tant pis ! Partie remise... à condition que la trappe ne soit pas sans fond ! Et cela ne change rien à l'importance que les communicants doivent accorder à ce sujet et à ces nouvelles "parties prenantes" (les "stake-holders" comme disent les Américains).

BEBEAR, AXA ET LES HEDGE FUNDS

Claude Bebear, le président d'AXA, fait aujourd'hui la une des Echos. Fidèle à lui-même, et courageusement, il demande que l'on crée plus de transparence, de contrôle et de "corporate governance" sur les Hedge Funds. A l'inverse, il explique avec beaucoup de clarté l'utilité économique et sociale des Fonds de Private Equity. C'est un sujet surlequel je travaille régulièrement et que je connais bien.

On assiste actuellement à un étonnant problème d'"opinion" qui consiste à mélanger des torchons et des serviettes, en mettant dans le même sac les deux phénomènes ( Hedge Funds et Private Equity) alors qu'ils n'ont strictement rien à voir à part le mot "Fonds", incarnation apparemment devenue diabolique du nouveau "capitalisme financier".

De fait, c'est à peu près la même chose chaque fois qu'un phénomène nouveau émerge : il faut du temps pour comprendre et encore faut-il que les intéressés s'expliquent. Donc bravo à Bebear et bravo aussi aux efforts récents (quoique tardifs !) de l'AFIC sur le sujet.

En l'occurence,tous les spontanément (et parfois à juste titre) "inquiets du changement" se focalisent sur les quelques opérations (et cela arrive comme dans toute action humaine !) qui se sont mal passées pour élargir et généraliser; et ils ignorent du même coup toutes les autres (sans doute un bon 95% des cas) opérations et LBO où cela a permis une transmission en douceur de l'entreprise et une capacité renforcée à se développer (et à créer de l'emploi!).
De même quand on parle de l'endettement causé par les LBO, on oublie que les financiers sont les premiers à souhaiter le développement de l'entreprise et intègrent donc ses besoins en financement et investissements dans leurs calculs ! Quand aux Fonds de Private Equity eux-mêmes, leur intérêt direct est bien que l'entreprise se développe fortement, durablement et de façon rentable car c'est la meilleure façon pour eux (infiniment plus que de percevoir des dividendes !) de valoriser à terme leur investissement !

Un vrai cas d'école d'image, de communication et d'opinion ! Bravo à Bébéar de contribuer à un début de clarification !

LA COM SARKO/SEGO, C'EST PARTI ! (1)

Cette fois-ci, c'est vraiment lancé ! Sous l'angle de la com, ça risque d'être intéressant !

Certains, aujourd'hui, critiquent la "débauche" d'argent de la Convention UMP d'hier. C'est de bonne guerre mais on est en pein dans un domaine de "com interne"...

Les deux candidats ont , au fond, pour accéder à la candidature, mis en oeuvre la même stratégie : s'appuyer sur les militants et - ce n'est pas indiférent- faire rentrer, grâce à internet, le maximum de nouveaux jeunes adhérents. A partir de là, les situations diffèrent :

- côté Ségo, il s'agissait de contourner les éléphants et donc de se démarquer des structures du PS. Idem vis à vis de l'opinion: garder le maximum de liberté par rapport au "Programme" officiel. Résultat : certes les trois débats et du travail de terrain, mais surtout pas de grande messe du Parti ! Et, de toute façon, c'est François qui tient l'appareil !

- côté Sarko, peu de vrais éléphants, seulement 2 ou 3 vrais "crocodiles" ! Une montée s'appuyant totalement, dans la phase qui se termine, sur le Parti dont il fallait la bénédiction. Donc, d'abord la Présidence de l'UMP ; puis, le coup de maître : faire changer les statuts pour obtenir la "nomination" par les militants et non plus par un quelconque Conseil National du parti ; puis "l'élection" quasi à la Poutine ! Et maintenant, il faut mettre tous les militants au boulot >> une grosse opération de com interne à retombées externes : participation au vote, fierté d'appartenance, solidarité/effet de masse, galvanisation stratégique etc etc . Dans ce schéma, l'opération "porte de Versailles" se justifie totalement et elle est même un remarquable investissement de com !

Rappelons-nous : plus il va y avoir d'internet/extranet, de "conference-calls" etc et de com "dématérialisée", plus il faudra compenser par de l'humain et du contact >> des conventions et des événements .

A suivre... et ceci, essayons !, indépendamment de toute préférence politique !

LES "CLASS ACTIONS" ARRIVENT !

Cela ne se fera pas encore forcément avec la législature actuelle, mais... ça vient !

Objectivement, je trouve assez normal , dans une démocratie "libérale", qu'un groupe d'individus puisse, ensemble, demander réparation d'un dommage à une entreprise. Je comprends que les entreprises s'inquiètent, surtout quand on voit les excés du système américain ; mais on ne peut pas à la fois se prétendre "socialement responsable"et s'y opposer. Certes, cela va couter de l'argent mais ... les entreprises US (et bien d'autres pays) vivent avec (et avec tous les excés ) sans que leur compétitivité ou leur rentabilité semble entamée gravement !

Je suis même choqué par la timidité du texte de loi actuellement prévu, si j'en crois l'article de Michel Derenbourg dans Enjeux/Les Echos. En effet :
> cela ne couvrirait que les obligations "contractuelles" non respectées,
> seront notamment exclus du système les atteintes à l'environnement, les dommages corporels ou ... tout montant supérieur à 2 000 euros !
> seules les associations de consommateurs agréées au plan national pourront utiliser ce recours et seulement pour faire reconnaitre la responsabililité globale de l'entreprise... Ensuite....

De qui se moque-t-on ? Bref, l'amiante, le plomb, AZF , la marée noire de l'Erika ou d'autres, etc etc n'entrent pas dans le champ !
Je comprends bien que, comme dans beaucoup de réformes de société, il faut commencer par un bout même petit et que l'on pourra toujours élargir ensuite ! Je suis un partisan de l'initiative individuelle et d'un système "libéral" "responsable" (voir aussi ma note du 20 décembre). Mais un texte de ce genre me semble justement une plaisanterie : cela n'est pas ainsi que l'on pourra réconcilier les Français avec leurs entreprises...

En termes de communication plus opérationnelle, et loi ou pas loi, il est clair qu'il faudra de plus en plus s'occuper des relations avec les citoyens, les organisations de consommateurs et associations et toutes les "parties prenantes" de l'entreprise.

POUR LES PATRONS DE PME...

La Chambre de commerce et d'industrie de Paris (pour laquelle je mène certaines missions) fait décidément peau neuve : après avoir modernisé en douceur son logo, elle ouvre aujourd'hui un "numéro unique" ( 0820 012 112) pour toutes les demandes d'information liée à l'activité de l'entreprise. Et, à la différence de certains organismes publics, elle n'entame pas le coup de clairon ..., ce qui évite les embouteillages du premier jour puisque ; j'ai essayé : la réponse a été très rapide !

Surtout, de multiples expériences antérieures m'ont montré que c'est l'un des endroits les plus efficaces (le site ou par téléphone) pour trouver les infos concrètes dont le patron de PME que je suis peut avoir besoin : l'adresse du syndicat des centres d'affaires pour trouver un bureau durgence, la définition du statut de jeune en entreprise pour embaucher au bon statut, la liste particulièrement claire des démarches pour créer une nouvelle société etc. Avec... la gentillesse en plus !

C'est rare et vaut la peine d'être souligné... Et c'est surtout très précieux.

BRETON CARBURE FORT !

Thierry Breton vient de lancer un site "comparateur" des prix de l'essence: excellente idée.

Je suis de fait très stupéfait de la façon dont les media traitent, chaque fois, les embouteillages de connections des premiers jours en ayant l'air de dire que, une fois encore, les Pouvoirs Publics se sont plantés !

Certes, dans certains cas, on peut avoir sous-estimé l'accueil du public (cf le géo-portail à l'origine).
Mais c'est pourtant le contraire qui serait anormal : si les connections étaient calibrées à un niveau capable d'assumer l'effet d'annonce et de curiosité des premiers jours, cela voudrait dire que, en rythme normal, le système serait totalement sur-dimensionné et que l'on aurait gaspillé l'argent du contribuable ! Mieux vaut démarrer prudemment et reviser à la hausse ensuite que l'inverse car il est plus difficile de revenir en arrière que d'avancer. On ne peut pas critiquer l'Etat pour sa mauvaise gestion et, simultanément, pour ses efforts de modernisation et de gestion !

Mais encore faudrait-il que les politiques expliquent d'emblée comment cela va se passer et que l'on aura sans doute un peu de mal au début ; et qu'ils "assument" cette bonne gestion plutôt que voir tout le monde s'affoler et se préparer à ouvrir le parapluie pour la prochaine fois !

RIONS UN PEU !

La Newsletter Stratégies d'aujourd'hui signale à juste titre le blog http://www.behype.net/blog/index.php?2006/11/28/30-la-prostipublicite

Les commentaires échangés expliquent (un peu rageusement) que c'est un plagia de spots radios anciens réalisés en auto-ptomotion par Lowe-Alice, maintenant Lowe Paris. Sans doute... Et sans doute aussi certaines images sont un peu "forcées" ou d'un goût pas bien vécu par certains ou certaines !

N'empêche, le truc est drôle, sympa, bien vu , bien tourné. Alors..., même si c'est plagié et parfois limite, ne nous privons pas de ce plaisir et de ce moment de détente !

LA "DEMOCRATIE PARTICIPATIVE" DANS LES FAITS...

Discussion très riche avec un membre de l'équipe de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) pour qui j'ai mené plusieurs missions.

La CNDP reste peu connue malgré le travail de fond qu'elle effectue depuis sa création. Certes, elle semble avoir choisi pour elle-même une certaine discrétion (dommage !). En plus, les sujets qu'elle traite concernent le plus souvent des équipements et infrastructures locaux et régionaux : les grands media s'intéressent peu à un débat sur ... l'extension du port de containers de Fos sur mer même si l'avenir d'un grand bassin d'emploi et de vie est concerné ! Quant aux "politiques", comme on l'a vu quand Ségolène Royal a commencé à parler de "démocratie participative", ils voient plutôt dans tout cela une concurrence à leur fonction représentative !

Les Pouvoirs Publics ont cependant aussi confié quelques débats nationaux à la CNDP. Celui sur les Déchets Radioactifs, mené par Georges Mercadal, quoique très technique, a été une belle réussite : il a ouvert la voie à la loi sur la Sécurité Nucléaire votée plutôt dans le consensus; surtout, associations et environnementalistes considèrent que le rapport de ce Débat est l'un des meilleurs documents actuels sur ce sujet. A un moment où l'avenir du nucléaire reprend toute son actualité, ce n'est pas mince !

Bien au-delà, on a bien là un mécanisme de "démocratie participative" qui fonctionne plutôt bien. Certes, certains spécialistes cherchent à opposer "Débat Public" et "Conférence Citoyens" et considèrent ces dernières comme plus adaptées. A cela trois remarques de "communication" :

> les "conférences de Citoyens" ne sont pas grand chose d'autre que nos bons vieux "groupes quali" dont on a enlevé la vitre fummée d'où l'on pouvait suivre le déroulement; et, c'est vrai, la méthode est très riche !

> ces "conférences" ne sont guère applicables facilement dès que l'on veut aller un peu loin sur des sujets très techniques, genre déchets radioactifs ou nanotechnologies,

> les deux méthodes sont plutôt complémentaires : on aurait pu démarrer le Débat Déchets Radioactifs par une Conférence citoyens pour cerner les "grandes peurs" de la problématique puis aller plus loin par les autres méthodes effectivement utilisées ; cela dit, les "grandes peurs"... étaient connues d'avance et se sont de toute façon exprimées par la voie des associations.

Au total, je ne sais pas ce que Ségolène a derrière la tête mais, n'en déplaise aux caciques, tout cela est un vrai sujet. Et avoir transformé sa proposition (sans doute maladroite dans sa forme) en "jurys populaires" m'a semblé stupide et "politicien". C'est bien tout le sujet !

MAURICE LEVY, L'"IMMATERIEL"....

Lu le rapport de Maurice Lévy et Jean-Pierre Jouyet sur "l'économie de l'immatériel". Passionnant !

Pris un par un, chaque "morceau" n'est pas forcément nouveau: l'enseignement supérieur et la formation, la création/créativité/recherche/innovation, les brevets, la finance, les logiciels et jeux électroniques etc. Mais, mis tous ensemble, ils installent une vision dynamique et stimulante de ce qui est en train de bouleverser l'économie.

Par rapport à la com., j'en retiendrai quelques éléments :

- l'Etat exploite mal ses marques "publiques" type INSEE, INA, Meteo France, Louvre etc, notamment à l'international,

- pourquoi ne pas accepter de la pub et des bannières sur les grands sites web publics très regardés genre ANPEE, sites culturels etc ?

- la création culturelle et artistique, tout comme la mode, est une valeur forte de la marque France,

- la marque France est mal valorisée, malgré les efforts de l'AFII (Agence française des Investissements Internationaux) àlaquelle il faut donner de vrais moyens pour ses campagnes à l'étranger,

- pourquoi une entreprise peut-elle amortir une marque qu'elle a achetée et pas une marque qu'elle a construite et développée elle-même ?

Deux sujets quand-même qui me paraissent traités un peu vite :

- l'importance d'une place financière forte, mais - c'est vrai - d'autres rapports traitent déjà du sujet,

- "enrichir et valoriser le capital humain" : c'est bien de proposer des mesures fiscales pour amortir ce "capital" et inciter à la formation ; mais, pas un mot sur l'immense tâche de com. interne, de reconnaissance et de valorisation des salariés que la plupart des entreprises et institutions de tous types à commencer par celles de l'Etat et des collectivités ont encore à mener à bien.

Dommage que cette lacune vienne d'un si grand communicant...