Très intéressante étude comparative sur les salariés face au changement, réalisée par The Economist Intellgence Unit et résumée par Muriel Jasor dans Les Echos de lundi 23.
En synthèse, elle nous dit que les salariés français ont une résistance au changement nettement plus forte que la moyenne des 10 pays europées inclus dans l'enquête ( 38% en France contre seulement 18% pour la moyenne).
Et cela ne viendrait pas d'autres facteurs plus opérationnels ( mauvaise com, faible engagement de la direction, problèmes de pilotage, difficultés budgétaires) puisque, sur presque tous ces points la France fait à peu près jeu égal avec la moyenne des autres.
Ce serait donc réellement "sociologique" ?
Ce résultat me laisse un peu dubitatif. Pour deux raisons en particulier :
- l'enquête a consisté à interroger des cadres eux-mêmes ... Donc il s'agit de la façon dont les cadres jugent leur propre conduite du changement !
- sur le critère "problèmes de pilotage", les Français se trouvent très nettement meilleurs que les autres : 15% contre 24% pour la moyenne....Voire !
Ma lecture de tout cela, de ce que je vois et vis dans de nombreuses entreprises, est très différente : nos dirigeants et nos cadres sous-estiment totalement le travail amont de réfléxion et de communication que suppose tout changement ; ils prennent la communication trop tard et comme un simple outil alors même que, encore plus que sur d'autres problématiques, elle doit très tôt être partie intégrante de la réfléxion de changement et de sa stratégie. En l'occurence, chez nous, on cogite la réorganisation puis on se demande comment on va communiquer sur le sujet. Et , patatras, trop tard ! Et on déclare que "les français sont rétifs au changement" !
Il y a encore du pain sur la planche !
Les 3 leviers du dirigeant — le marketing, la communication, le management (MCM) — doivent fonctionner ensemble pour réussir le changement. La communication doit jouer son rôle, tout son rôle, mais rien que son rôle.
Il est intéressant de noter que chacun, au niveau n-1, est encore très nombrilo-centré : en témoigne l'article que vous citez mais aussi, côté RH, l'étude menée par le BCG aux USA, en France, en Allemagne, en GB, en Chine, en Inde et au Japon. Les DRH Français sont les seuls à placer la mesure de la performance RH comme priorité stratégique, et même en 1ère priorité, alors qu'aucun autre pays ne la classe dans les 5 premiers (ils préfèrent des sujets interconnectés MCM : gestion des talents, développement du leadership...) !
Il y a donc un joyeux mélange de la cause et de la conséquence : je pense plutôt que les cadres Français ne sont pas rétifs au changement mais que les organisations ne sont pas organisées pour jouer collectif. Et le responsable en est... celui qui façonne l'organisation, évidemment ! Le secteur public en est une bonne illustration, n'est-ce pas ?
Rédigé par : Hervé | 14 juillet 2008 à 19:16