Le weblog de Philippe Heymann

DEXIA COULE ENCORE UN PEU PLUS LA COMMUNICATION FINANCIERE !

Rappelons-nous... Au fil des mois, et encore juste avant l'été, DEXIA et son administrateur délégué Pierre Mariani (pourtant un ancien directeur de cabinet d'un ministre du Budget !) répétaient que la banque avait surmonté ses difficultés et tiendrait la distance....Ainsi, la synthèse du communiqué des résultats du 2ème trimestre disait : " les résultats du 2e trimestre 2011, à EUR -4 032 millions, reflètent une solide performance commerciale et l’impact de l’accélération du programme de cessions annoncée en mai: USD 8,8 milliards d’actifs garantis du portefeuille Financial Products cédés à ce jour." Il reste que, en même temps, collectivité après collectivité , les réclamations sur les mécanismes d'emprunts  bourrés de produits toxiques que la banque leur avait mis en place se multipliaient....

La communication financière n'avait vraiment pas besoin de cela après les multiples "incidents" de ces dernières années : Madoff, l'affaire Kerviel, les subprimes bénies par les agences de notation, les comptes grecs "ré-habillés" grâce aux conseils d'experts-banquiers etc etc. Et, comme par hasard, tout cela arrive autour du secteur bancaire, la clef de tout développement des entreprises ! Lequel secteur nous inonde, périodiquement, de chiffres merveilleux pour nous prouver que ... tout va bien ! Et les rumeurs disaient encore il y a peu que Pierre Mariani prendrait en décembre la tête de BNP Paribas....

Une sacrée pente à remonter pour certes les banques mais aussi pour toutes les entreprises qui font et feront appel au marché financier. Il faudra, d'une certaine façon, réinventer une information financière crédible !

DU "STYLE" LAGARDERE AU STYLE DSK... OU METTRE LE CURSEUR... ?

Je ne reviendrai pas sur le fond des propos de DSK, sa "confession" ou sa "faute morale" ou le final avec les yeux qui se ferment... Mais , aujourd'hui, les dirigeants ont quelque mal à savoir où mettre le "curseur" dans leur façon de s'exprimer ou de communiquer : de la vidéo "naturelle"  et "spontanée" d'Arnaud Lagardère à l'interview ultra-verrouillée, répétée et "media-coachée" de DSK dimanche soir, quoiqu'on dise, on vous tombe sur le dos et on a droit à un monceau de critiques !  Et ... tout de suite !

Qui plus est, on ne sait plus non plus s'il faut jouer la réactivité ou la "distance"...

Un chroniqueur écrivait ces jours-ci que, finalement, Sarkozy et DSK font le même choix de communication : essayer de parler à tous les Français et ne pas se préoccuper des critiques inévitables  d'une certaine élite parisienne. Et, en même temps, cette fameuse "élite" retransmet, répercute, démultiplie même si, aujourd'hui, la démultiplication se fait au moins autant par le buzz électronique  !

Bref, en matière de "crise" et de prise de parole publique, il n'y a sans doute plus de règle absolue ; plus encore qu'avant, chaque cas est différent. Mais,au bout de compte, cela ne veut-il pas dire que la priorité revient  finalement vers la "personnalité" réelle de celui qui parle ? Etre soi-même...

EN COMMUNICATION, LE RETOUR DE DSK N'EST PAS DU MEILLEUR GOÛT !...

Je ne reviendrai pas sur les  événements du Sofitel , de toute façon déplorables pour un candidat à la Présidence quelle que soit la véritable version  et quelle que soit l'estime que l'on peut avoir pour ses capacités intellectuelles...Et je resterai sur le plan de la "communication de crise"...

C'est clair :  son retour en France est du plus mauvais goût ! Alors qu'il pouvait parfaitement organiser un retour discret par escale interposée, voila que, comme par hasard, TV, radios, photographes etc l'attendent à l'aéroport et qu'il se fait un retour de "star de retour de  vacances" ! C'est tout juste s'il n'est pas bronzé...Et, comme par hasard, il y a une caméra qui traîne à l'intérieur même de la cour de son immeuble !

Voilà  donc quelqu'un qui a trouvé  normal et judicieux d'aller s'excuser auprès de ses anciens collaborateurs du FMI  à Washington... et qui, débarquant en fanfares à Paris, n'estime pas nécessaire de dire autre chose que "bonjour" !

Je sais bien que cela correspond à une stratégie mûrement réfléchie et qu'il va  choisir son moment prochain pour s'exprimer (c'est  déjà prévu, j'imagine !)... Mais...mais ... cela manque nettement d'égard vis à vis des Français et de "spontanéité".... 

Certes,  en termes de communication de crise, c'est un beau challenge d'organiser la "reconquête" et c'est à suivre de près ! Mais... mais , l'opinion,cela se gagne aussi avec le coeur !

COCA COLA ET SA BIEN MAUVAISE COM/CHANTAGE DE CRISE !

Etonnant quand-même qu'une société comme Coca-Cola fasse une telle erreur de com ... même si elle l'a vite reconnue et fait machine arrière !

Que les professionnels de l'alimentaire  et des boissons s'inquiètent d'être les "boucs émissaires" de la santé et de la lutte contre l'obésité, c'est leur boulot et leurs organisations professionnelles s'y emploient... Mais qu'un "géant" de la com comme Coca vienne menacer d'interrompre son investissement en France  de ... 17 millions d'euros parce que l'on va taxer certains de ses produits à raison d'un centime par canette, c'est un peu gros et, surtout, ce n'est pas crédible !

Cette '"erreur de communication"  n'est clairement pas bonne pour son image. Il n'y a pas si longtemps, me semble-t-il, la marque s'était offert une belle campagne de pub en France pour démontrer sa "citoyenneté"...

En cas de crise (mais... était-ce vraiment une crise ?), il faut certes réagir vite mais... à bon escient. Et la plupart des marques concernées ont bien sagement laissé leurs organisations monter au créneau !

A PROPOS DE LA SOCIETE GENERALE, ... ELLE COURT, ELLE COURT, LA RUMEUR !

L'affaire de la fausse fausse rumeur sur la solvabilité de la Société Générale doit, une fois de plus, nous faire réflechir sur l'usage des nouvelles techno et  des réseaux...

Car, certes dans un climat de forte nervosité, il a suffi qu'une jeune journaliste oublie de mettre LOL sur son message twitter et d'indiquer ainsi qu'elle était dans l'humour pour mettre le feu aux poudres !

Il est vrai  que le "feuilleton-fiction" du Monde de l'été était tellement proche du possible (celui de l'an dernier aussi, rappelez-vous, sur le "faux" procès de Jacques Chirac) que l'ambiguité pouvait exister ! Et que Le Monde devrait, lui aussi, méditer sur le choix de ses sujets de "fiction" ...

Pas question évidemment de "contrôler" quoi que ce soit mais un vrai travail de  réflexion/débat en profondeur  est nécessaire sur la façon de faire de la part de ceux qui sont amenés à  émettre ou se servir de ces infos et de les retransmettre.

LES AGENCES DE NOTATION AU COEUR DE L'INFORMATION FINANCIERE

On attaque beaucoup, tous ces temps-ci, les fameuses agences de notation financière et il y a certainement beaucoup à revoir dans leur fonctionnement (le mode de rémunération en particulier et la publication de notes concernant les institutions "sous perfusion" ...). Je comprends bien que cela n'arrange pas les emprunteurs en difficultés et que cela aggrave leurs difficultés....

Mais on ne peut pas non plus les critiquer de faire leur travail... Après tout, elles disent à haute voix ce que, autrement, seuls de discrets experts et financiers  sauraient parfaitement . Et, après tout, quand elles ont commencé à dégrader la Grèce, cela aurait peut-être du être fait beaucoup plus tôt si certains de ces fameux experts  n'avaient pas aidé à maquiller les comptes de ce pays !

De plus, les banques et "agents de change"  qui, à une certaine époque, publiaient des notes et analyses très suivies préfèrent aujourd'hui se réfugier derrière les agences de notation... Il est vrai que certains critiquaient leurs multiples casquettes simultanées : prêteur des entreprises et des institutions et ... analystes des situations ! Et on mettait régulièrement en cause le fameux "chinese wall" qui aurait du séparer ces activités...

On reproche aussi aux agences leur situation d'"oligopole" car elles ne  sont que trois. Mais... mais..., à y bien regarder, on trouvera un très grand nombre de secteurs et d'activités où les trois premiers mondiaux font facilement ensemble 70 à 80 % du marché !

Je sais que la défense que je fais là va à contre-courant du discours actuel. Mais il reste que ces agences sont aujourd'hui un rouage clef de l'information financière. Et je ne suis pas plus rassuré à l'idée que l'on pourrait créer une agence internationale "publique" qui risquerait fort d'être encore plus "sous influence"... Préservons, de grâce, des rouages essentiels de l'information financière !

A LA RECHERCHE DE LA CONFIANCE PERDUE....

Sous ce titre, l'Afci (Association française de communication interne) publie son plus récent  et remarquable Cahier de la communication interne de juin 2011. Vaste sujet qui me tient à coeur et surlequel je suis souvent revenu !

Je n'en retiendrai que cette seule citation en Editorial : "la confiance semble indispensable pour retisser les relations humaines délitées et refonder un contrat social capable de vaincre les crises. On entend souvent la formule incantatoire : il faut restaurer la confiance !  Et pourtant les crises de toute sorte s'accumulent et la confiance semble de plus en plus être un voeu pieu !"

Les signes dans ce sens se multiplient sans même reprendre les sondages grand public  : fin juin, la nouvelle étude "Trust & Purpose" de Burson-Marsteller allait dans le même sens ; un seul chiffre : pour 60% des sondés, "la plupart des communications des entreprises sont des mensonges". Et , pour 88% des Français interrogés, la première préoccupation des entreprises devrait être de penser à leurs clients et employés en s'assurant qu'elles gèrent leurs activités de façon éthique et responsable. Et 73% pensent qu'elles font le contraire...

Et regardons les multiples enquêtes qui montrent que les jeunes embauchés démarrent plein d'espoir lorsqu'ils commencent  un job mais ont le moral qui baisse vite année après année pour finir "cassé" en 4 à 5 ans !

De fait, on dépasse de loin le simple problème de communication. On est dans le management ou même dans la façon de faire évoluer notre "système de valeurs économiques".

Le problème est que ... le temps presse !

THIERRY SAUSSEZ ET SON "MANIFESTE POUR L'OPTIMISME"....

Thierry Saussez  vient de publier chez Plon un "Manifeste pour l'optimisme". C'est un grand professionnel de l'opinion et de la communication et il a raison de s'inquiéter du pessimisme actuel des Français et de penser que nous avons plein de raisons de positiver !!!

Mais je le suis nettement moins quand il  prend pour symbole de ce pessimisme le succès de l'essai de Stéphane Essel... Car, dans tout son propos, il semble ne pas prendre vraiment la mesure de ce  "malaise" actuel, cet espèce de "bruit de fond" dont certains commencent à parler ! Car l'accumulation des crises ou "affaires" de tous types, vraies ou fausses,  depuis pas mal d'années,  mène nécessairement au doute... quand cela ne va pas plus loin ou pas encore : les frégates du Moyen-orient ou de Karachi, les épopées successives Bettancourt/Woerth/Maistre & co, les salaires des hauts dirigeants, les 300 000 euros de rémunération de chacun des trois arbitres du litige Tapie, le chômage des jeunes issus de la diversité, notre aide à certains pays qui se dilue dans la corruption,  jusqu'à l'actualité de ces dernières semaines etc etc . Et le succès de Stéphane Essel n'est rien d'autre que le reflet de tout cela.

D'autant que ce doute et ce pessimisme à l'égard de la parole publique, qu'elle soit de gauche ou de droite, mènent tout droit à un doute  plus profond et plus inquiétant  face à notre "système"  politico-socialo-économico-démocratico-libéral. Et l'opinion n'entend pour l'instant  nulle part une voix forte, crédible et responsable qui réponde à ce malaise rampant !

Oui , Thierry Saussez a raison de s'inquiéter du pessimisme des Français. Et la communication publique doit nécessairement prendre tout cela en compte. Mais... la réponse est un peu courte  pour l'instant !

THIERRY WELLHOFF : "LA COMMUNICATION CORPORATE POUR CREER LA CONFIANCE"

Remarquable  et lumineux papier de Tierry Welhoff, président de Wellcom et de Syntec RP, dans le dernier numéro de Statégies, sous le titre : " Pour sortir du dédale de la communication" (page 10).

Il   remarque d'abord que "tous les métiers de la communication  partagent au moins deux fonctions :

- d'une part celle de contribuer, d'une manière ou d'une autre, à l'augmentation de la notoriété d'une marque, qu'elle soit une marque-institution, une marque-entreprise ou une marque-produit,

- d'autre part, celle de l'aider à relever ses défis."

Puis il classe avec justesse l'ensemble des "métiers" de communication en trois grandes catégories :

+ les métiers de la publicité et de l'achat d'espace ; ils  "visent essentiellement la création d'intention " (d'achat ou d'adhésion); ils utilisent la technique du "déplacement",

+ les marketing services ( promotion, stimulation, marketing direct) devenus CRM ou relation client; ils visent essentiellement à inciter le comportement (achat, souscription ou adhésion); ils ont recours à la conviction,

+ les métiers des relations publics  et ceux de la communication corporate ; ils visent à créer de la confiance et font appel à la relation, l'information et "la capacité à faire partager une vision au travers d'une richesse de contenus".

Et, en conclusion, il constate... que "sans la confiance..., toute démarche de séduction ou d'incitation reste sans avenir.

Certes, ce sont là les propos du Président de la profession des RP qui plaide pour sa paroisse... mais je les partage totalement !

 

LE SONDAGE DU COMPLOT DSK ET L'INSTITUT CSA....

Le sujet des "conflits d'intérêts" ou,ici, des "intérêts croisés" me tient à coeur car il est symptomatique du "libéralisme à la française"...On en prend les "bonnes" choses et on en écarte les "contraintes" !

De quoi s'agit-il  ici  ?  Dans la foulée de l'affaire DSK, l'institut de sondage CSA lance très vite une enquête à chaud  qui aboutit à la conclusion qu'un nombre important de Français pensent que tout cela est le résultat d'un complot ... Rien de choquant jusque là.

La question est que le CSA appartient à Vincent Bolloré et qu'il est dirigé par Bernard Sananés, en tout état de cause un très grand professionnel. Or Vincent  Bolloré  contrôle l'agence Euro RSCG C&0 qui, elle-même, s'occupe de l'image de DSK . Et Bernard Sananés lui-même était il n'y a pas si longtemps directeur général de la même agence avant de devenir Dircom d'EDF puis d'être récupéré par Bolloré; il  connaît donc on ne peut mieux Stéphane Fouks et les autres...

Je veux bien croire les responsables de CSA quand ils disent qu'ils se sont comportés en professionnels et n'ont eu à ce sujet aucun contact avec les communicants de DSK. Dont acte.

Mais les choses seraient quand même plus simples et plus claires et l'on ne poserait même pas ce genre de questions  si l'on ne trouvait pas dans le même groupe (et ce n'est pas le seul) des activités qui, dans d'autres pays dits "développés" , seraient considérées comme incompatibles....