Le weblog de Philippe Heymann

VIVENDI NOUS DIVERTIT...

J'aime bien la campagne de Vivendi qui vient de sortir (signée BETC) :
des pleines pages N & B avec de belles photos attachantes. Elle est sobre, belle, sans tape à l'oeil et pose bien le positionement "divertissement".

Mais je ne suis pas complétement au clair sur son objectif.
Plusieurs hypothèses :
- après les agitations récentes et discussions de rachat par KKR, Vivendi veut rappeler que l'entreprise est là et bien là,
- signifier qu'après tous les mouvements de ces dernières années, le groupe est à nouveau "en ordre de marche",
- installer plus fortement ce positionnement "entreprise de divertissement".

Ou, tout simplement, les trois à la fois ! Bien joué...

LES DISTRIBUTEURS A LA TÉLÉ

Je sors, pour une fois, du cadre strict du "corporate !
Discussion hier avec Tony Blum, l'un des meilleurs "cost controleurs" en audiovisuel après avoir été lui-même producteur.
Il me fait remarquer que la pub distribution à la Télé ne révolutionne pas seulement la structure des budgets ; elle va poser un problème de fond radicalement nouveau aux annonceurs, agences et producteurs français : c'est la première fois qu'ils font vraiment de la Télé pour la distribution ! Et, dit-il, ce n'est pas du tout la même chose !
Les annonceurs vont nécessairement pousser progressivement vers la "promo" et les limites seront délicates à trouver. Un exemple : les spots seront nettement plus calés sur les saisons ou les événements du calendrier ; il ne s'agira donc plus de préparer une campagne que l'on pourra amortir ensuite sur deux ou trois vagues dans l'année ! D'où les conséquences sur le style, le fond, les moyens et les coûts des spots. etc etc
Certes les grands groupes de pub peuvent puiser sur les expériences et les savoirs de leurs collègues étrangers . Mais , quand on connait les bagarres et baronies entre filiales de certains groupes, rien n'est sûr !
Une affaire en tout cas à suivre.

AFFICHEZ-VOUS VOUS-MÊMES !

Je sors d'un RV à la Caisse des Dépôts, au 56 rue de Lille. leur hall d'accueil, en dehors de la spectaculaire statue, est intéressant en communication : un savant dosage de photos illustrant les activités du Groupe + deux écrans vidéos près des sièges d'attente + un panneau mobile plus événementiel. Bravo !
Je constate que beaucoup de sociétés ne pensent pas à utiliser , certes avec tact et précaution, leurs propres locaux comme support de communication. Telle institution voit défiler un bon 20 000 VIP par an dans ses salons de réception ; telle entreprise qui vend notamment de la formation voit défiler des stagiaires en formation par milliers : tous ces VIP, clients, prospects etc en repartent sans avoir perçu ne serait-ce qu'une seconde, une image, une phrase de plus qui contribue à l'image ou au message ! Je ne parle même pas du dépliant glissé dans les dossiers des stagiaires, participants à des colloques etc. On s'est mis depuis quelques années à mieux utiliser "l'affichage interne" en com. interne mais les "auto-supports" à vocation externe sont encore trop souvent oubliés.

LA VIOLENCE DANS LES PUBS ?

Faut-il montrer la violence, les drames, la misère dans des campagnes de pub , notamment en TV ? Le problème se pose en permanence pour des campagnes institutionnelles liées à de grandes causes ou des thématiques citoyennes, santé etc.

Dans une chronique en page 2 du Monde daté de dimanche 26/11 , Jean-Michel Dumay s’en étonne et s’en inquiète : « nous, qui passons sans rien voir… » dit-il à propos de la campagne de lutte contre la violence envers les femmes.
Certes, il n’y a pas réponse pré-déterminée : c’est du cas par cas avec toutes les gradations possibles de la pudeur absolue à la vision dure du drame. Mais, quand il faut agir sur les comportements, on ne peut éviter de chercher à marquer fortement les esprits.

Deux exemples réussis et pourtant très différents dans l’actualité :

- la Sécurité routière (qui remet actuellement son budget en compétition) : Eric Zajderman et son excellente agence Stratéus/Lowe ont été les premiers à réussir à convaincre les responsables publics qu’il fallait « montrer » le danger, la victime, l’accident, comme le faisaient depuis longtemps par exemple les Britanniques. Bien sûr, la peur du gendarme et des radars a beaucoup contribué à faire baisser la vitesse et… les accidents ; mais, même sans avoir vu les enquêtes, je suis convaincu que cette façon nouvelle de communiquer, même si ( ou parce que ?) au début elle a choqué, a joué un rôle très important.

- La campagne de La Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) qui démarre aujourd’hui (et signée Publicis Consultants) parvient avec tact à installer une communication forte : la porte « ouvert à tous » ou « fermé pour vous » . (voir aussi le très bon article d’Alain delcayre dans Stratégies du 23/11).

Oui, nous « passons tous sans rien voir » : il faut donc bien « montrer » ! La difficulté - et le talent ! - consiste ensuite à choisir le dosage et la tonalité.

LA PUB VINCI

Voir aussi le 22 janvier 2007 ma note VINCI 2.

La campagne actuelle de Vinci me laisse mal à l'aise !
Je comprends bien qu'il faille "tourner la page" après les épisodes Zacharias, comme le titre l'excellent article de Véronique Richebois dans Les Echos d'hier. Je comprends bien aussi qu'il faille, dès lors, promouvoir assez vite le nom du nouveau boss, Xavier Huillard. Et pourtant !
Ces engagements "humanistes" (que je "partage" tout à fait) me rappelle un peu l'époque où La Lyonnaise des Eaux, après quelques affaires difficiles de financement politique, s'est mise à publier sa "charte déontologique" !
Au fond, il me semble que, s'agissant de RH, cette campagne de pub là vient nettement trop tôt et donne dès lors un sentiment de "plaqué". On aurait pu imaginer que cela passe d'abord par des preuves, des relations presse, des stories concrètes, des interviews etc. On me dira que cela prend infiniment plus de temps et d'énergie qu'une bonne campagne de pub... Je crois fermement à l'utilisation de la publicité dans le "corporate" ; mais cet exemple me confirme qu'il faut prendre avec des pincettes son timing et à sa puissance.

Autre remarque : dans l'article des Echos, le Directeur de la stratégie chez Euro RSCG C&O dit de Vinci: "lorsqu'elle participe, via son activité de BTP, à la construction de ponts, d'écoles, d'hôpitaux et de bureaux, elle joue un rôle particulier dans la société qui n'est pas loin de la notion de service public. On pourrait presque parler d'entreprise privée d'utilité publique"... D'accord!!! Mais je ne vois pas là ce qui différencie Vinci de Bouygues, de France Télécom, de Carrefour ou Auchan, ou d'un fabricant d'armes qui contribue à la défense du pays ! Après tout, c'est le cas de toute entreprise... Certes, il ne faut pas cesser de le rappeler mais à condition que ce ne soit pas trop tiré par les cheveux !

PS 1 : je me rends compte que cela fait plusieurs fois en quelques jours que je mets un peu en cause des campagnes signées Euro RSCG C&O ( Natixis, EDF, Vinci etc). C'est un pur hasard car l'agence rassemble, à mes yeux, un ensemble de talents exceptionnels. Sauf s'il y avait chez eux comme chez d'autres , ce dont je doute, un sérieux penchant à multiplier l'achat d'espace....

PS2 le jeudi 23/11 : je viens d'entendre ce matin, dans l'excellente émission "service public" de France Inter un reportage sur Vinci; on expliquait qu'un certain nombre de salariés de Vinci s'étaient mobilisés avec succés pour accompagner des chômeurs. Bravo pour le fait lui-même ; et cette "preuve" terrain me paraît, dans ce cas, infiniment plus crédible et efficace que la pub !

CAMPAGNE SOCIETE GENERALE

Je lis dans le dernier numéro de Challenges - à mon sens, le meilleur magazine économico-business actuel - que la dernière campagne de pub "coups de pouce" de la Société Générale (signée Saatchi & Saatchi) affiche un taux de reconnaissance de plus de 80%, contre 60 à 65% à la même période pour le secteur bancaire.
Cela ne m'étonne guère : c'est l'une des campagnes que j'ai le plus remarquées à la TV... tellement je la trouve laide ,pour ne pas dire vulgaire !
La question me semble être de savoir s'il suffit d'être "remarqué" pour atteindre l'objectif ou s'il ne faut pas aussi déclencher de la sympathie, du désir et de l'empathie.
En ce qui me concerne, ce n'est vraiment pas cette campagne là qui m'aménera à la Société Générale, même si ,par ailleurs, la banque a de très nombreux atouts...

CAMPAGNE NATIXIS

Une enquête Ipsos pour l’agence Australie vient de témoigner d’une certaine lassitude des Français par rapport à la publicité. Je ne peux m’empêcher de rapprocher cela du véritable « matraquage » que nous assène actuellement Natixis en vue de son introduction en Bourse. Questions :
> A-t-on vraiment besoin d’une telle pression et de tels gadgets (par exemple la fausse couverture de Libération) pour réussir cette introduction même si elle est particulièrement grosse ?
> Peut-être, alors, veut-on installer une marque ? Mais, si j’ai bien compris, cette banque n’a rien à vendre au grand public !
> On peut aussi chercher à installer le nom de Natixis car le nom lui-même est un problème majeur : l’appropriation de noms comme Novartis ou Altadis reste , même avec le temps, difficile ; et ce sera dur , si ce n’est impossible, de nous faire comprendre la différence entre Caisses d’Epargne, Banques populaires, Natexis, Natixis et , demain peut-être, Natixia !

Tout cela me fait aussi penser au matraquage que nous ont imposé tout l’été Suez et Gaz de France pour nous convaincre de l’intérêt de quelquechose qui, à ce moment là, était encore interdit par la loi ! Tout communicant que je suis, j’en ai été choqué !
On me dira chaque fois que la situation est « exceptionnelle ». Certes ! Mais, à trop en faire, on contribue à nourrir le sentiment que répercute l’enquête Ipsos. Et il est aussi de notre rôle de professionnels de la communication (en l’occurrence l’excellente EuroRSCG C&0 qui avait déjà assuré la communication mamouth de l’introduction d’EDF) de savoir nous limiter ou d’avoir le courage de convaincre certains dirigeants d’entreprise que, au-delà de leur ego parfois sur-dimensionné, le plus peut devenir l’ennemi du bien…